La Croix

Le péché est un fait universel et capital qu’il nest pas permis de passer sous silence, c’est le trait le plus irrécusable de notre pauvre l’humanité. Quest-ce, en effet, que l’histoire de l’humanité? Est-ce celle de ses vertus, ou celle de ses désordres et de ses crimes? Égoïsme, cupidité, tromperie, injustice, usurpations, violences, crimes des rois, crimes des peuples, guerres .sans cesse renaissantes, passions de toute sorte, des larmes, de la boue et du sang, n’estce pas le fond douloureux des annales humaines? Et quelques rayons de beauté morale brillant dans ces ténèbres ne semblent-ils pas faire ressortir dautant plus la corruption de l’ ensemble ? – Qu’est-ce que la société, si ce n’est l’organisation des hommes en vue du mal quils peuvent se faire réciproquement, une digue opposée par les lois, par les contrats, par la pénalité; par la force dont la société dispose, à la perversité générale?- Qu’est ce que l’histoire de chacun de nous, si ce nest celle de- ses péchés? ?désobéissances de l’enfance, entraînements de la jeunesse, transgressions plus froides de l’âge mûr, péchés dactions, de paroles, de pensées, ruses du cœur, défaillances de la volonté, lâchetés de la conscience, souvenir humiliant du bien que nous navons pas fait et du mal que nous avons accompli,

nest-ce pas le tissu même de notre vie?.. . Qui de nous na senti, une fois au moins, le poids de sa propre corruption? Qui de nous n’a laissé échapper de son me l’aveu et le soupir de l‘apôtre : Je suis charnel et vendu au péché?… Et navons-nous pas prouvdu même coup que ce péché se dresse comme un invincible obstacle entre nous et Dieu? Ce nest point la distance de sa grandeur à notre petitesse qui nous sépare de Lui. Ah! si notre cœur était pur, il franchirait cette distance et serait aussi près du cœur de Dieu que l’est du sein de sa mère l’enfant endormi dans ses bras. Ce n’est point l’enveloppe matérielle dont notre âme est revêtue qui nous spare de Lui. Ah! si notre cœur était pur, à travers les voiles de la chair et du sang il verrait Dieu , et jouirait des douceurs de sa communion. Mais Dieu est saint et nous sommes pécheurs. De là la rupture du lien, de lune infranchissable distance morale. < Ce sont nos iniquités, dit Esaïe, qui ont fait sparation entre nous et Dieu. >> Et, de fait, cette séparation nest-elle pas l’tat conscient ou inconscient de la pauvre humanité? Nous: ne cherchons pas Dieu, nous ne l’aimons pas, nous n’entretenons pas avec Lui les rapports d’un enfant avec son père. Hélas! nous le craignons de cette crainte mauvaise qui éloigne et ferme le cœur,Nous le fuyons instinctivement comme un fils infidèle fuirait son père irrité, comme un accusé fuirait son juge, et nous sommes glacés d’épouvante la seule pensée de paraître devant Lui. Ce sont nos iniquités, nous redit le prophète, qui ont fait séparation entre nous et Dieu. Qui renversera cette muraille d’airain? Qui rétablira le lien brisé ? Christ et Christ crucifié. Si c’est le péché qui crée l’obstacle entre Dieu et nous, il faut que cet obstacle soit levé, et il ne peut être levé que par la Croix. C’est là notre seconde assertion, que nous allons justifier comme la première.Nul ne prétendra sans doute que Dieu soit indifférent au péché et ne veuille pas le punir. Quoi! la conscience nous le reprocherait et Dieu ne nous le reprocherait pas? La conscience nous condamnerait et Dieu ne nous condamnerait pas? Que serait donc alors la conscience? Elle ne serait qu’une illusion, une illusion d‘acoustique, comme on l’a dit. Nous croirions entendre dans cette voix intérieure et· supérieure la voix de Dieu, et nous ne l’entendrions pas? Derrière la conscience il n’y aurait rien, ou ce qui revient au même, ce qui serait pis encore ,il ny aurait qu’un Dieu indifférent au péché, qui ne réagirait en rien contre lui, qui verrait du même œil et qui accueillerait du même sourire dans son ciel dérisoire, le juste et l’impie, le chaste et l’impur, l’oppresseur et la victime, Lazare et le mauvais riche, saint Paul et Néron!. .. Non cela ne se peut; un tel Dieu vous ferait horreur et vous souscrivez tous à cette parole d’un penseur chrétien : le Roi du ciel ne peut signer que des paix glorieuses!

Amen

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